Les crises dans les Etats et dans le
monde, quelle que soit leur manifestation, ont toujours un soubassement
financier. C’est donc dire l’importance
de la finance et la nécessité d’un encadrement des finances aussi bien
publiques que privées. Au Bénin, jusqu’à ce jour, les exigences de la reddition des comptes ne
sont par toujours comprises et encore moins mises en œuvre. Il va s’en dire
donc que l’effectivité du fonctionnement d’une juridiction des comptes est
tributaire des textes organiques et moyens affectés.
Marie-Louise BIDIAS MATCHOUDO
« La
reddition des comptes est l’essence même de la démocratie qui est le régime
politique dans lequel le peuple exerce sa souveraineté lui-même, sans
l’intermédiaire d’un organe représentatif (démocratie directe) ou par
représentants interposés (démocratie représentative) (article 4 de la
constitution du 11 décembre). On parle de gouvernement du peuple par le peuple
et pour le peuple », ainsi s’exprimait le Conseiller à la chambre des
comptes de la cours suprême, Maxime Akakpo, au cours d’une communication sur «La reddition des
comptes », le 27 avril 2012 à Cotonou, au cours de la 2ème
rencontre mensuelle du Réseau des
journalistes économiques du Bénin (Rejeb). La Constitution béninoise en son article 99 dispose
que : « Les lois de règlement contrôlent l'exécution des lois de
finances, sous réserve de l'apurement
ultérieur des comptes de la Nation par la Chambre des Comptes de la Cour
Suprême ». L’article
112 précise que : « L'Assemblée Nationale règle les comptes de la
Nation selon les modalités prévues par la loi organique des finances. Elle est,
à cet effet, assistée de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême, qu'elle
charge de toutes enquêtes se rapportant à l'exécution des recettes et des
dépenses publiques, ou à la gestion de la trésorerie nationale, des
collectivités territoriales, des administrations ou institutions relevant de
L'Etat ou soumises à son contrôle». L’Assemblée
nationale est donc assistée par la Juridiction financière dans l’exécution de
sa mission de contrôle de l’utilisation faite par l’Exécutif des autorisations
qu’elle a délivrées.
Examen des comptes
Selon Maxime
Akakpo, un examen sommaire de l’exécution des missions dévolues à chacune des
structures, piliers de la démocratie, montre qu’au Bénin, le législatif et la
juridiction financière peinent à assurer. Tandis que l’assemblée nationale
semble beaucoup plus portée sur des préoccupations politiciennes, la Chambre
des comptes de la Cour suprême engluée
dans des problèmes institutionnels est démunis du minimum de ressources
finances pour la couverture de son champ de compétence. La première production
des comptes de gestion de l’Etat à la Chambre des comptes par l’exécutif qui
date du 30 juin 1999, portait sur la gestion 1998. Depuis des efforts ont été
faits de sorte qu’à janvier 2012, les documents de reddition de comptes 2010
(comptes de gestion, projet de loi de règlement et compte générale de
l’administration des finances) sont déposés à la Chambre. Selon lui, la Chambre
a élaboré et adressé au ministre des finances les rapports sur l’exécution des
lois de finances des années 1998 à 2006. Et l’Assemblée nationale a voté
les lois de règlement de 1998 à 2004. Elle devrait avoir actuellement sur sa
table celles de 2005 et de 2006. « Si
en matière de loi de règlement un effort, handicapé par les retards de
production et d’examen est fait. Il
en est tout autrement en matière d’apurement où aucun comptes de la Cour
suprême du Bénin processus de jugement de comptes d’un comptable public n’a
jamais conduit jusqu’à son terme et aucune procédure de faute de
gestion n’a été ouverte », explique le Conseiller à la Chambre
des comptes. Ceci, contrairement aux communes, où on note une intense activité
de la juridiction ces dernières années. Activité qui s’est traduite par une trentaine d’arrêts provisoires
et de nombreuses de notes aux maires
pour l’amélioration de la gestion. Maxime Akakpo pense que deux raisons
fondamentales peuvent expliquer le défaut d’activité des chambres des comptes
logées dans la Cour suprême. « Occupés
à mettre en place les fondamentaux d’une république (institutions politiques)
dans un contexte de ressources humaines qualifiées non disponibles, les acteurs
de l’époque n’ont pas vu l’urgence d’un bon mécanisme de reddition de compte,
reddition de compte au centre duquel se trouve la juridiction financière. Par
la suite l’assimilation de la juridiction financière à une juridiction
judiciaire a achevé ce bébé dont l’accouchement se présentait difficile ».
Conséquences : très peu de ressources humaines ont été déployées au profit
des Chambres et sections de comptes et la professionnalisation de l’audit
public externe a été reléguée au second plan. Non sans oublier la non couverture
du champ de compétence, la non production annuelles des comptes de gestion à la
juridiction et le manque d’apurement des gestions.
Les défis
Il est
établi que l’effectivité du fonctionnement d’une juridiction des comptes est
tributaire des textes organiques et moyens affectés. Concernant le cadre
juridique, il est important que la juridiction financière béninoise soit prévue
parmi les institutions constitutionnelles afin de leur assurer la place de
choix et l’indépendance nécessaires pour leur développement. De l’avis du
conseiller, Il faudra veiller à ce qu’elle soit une entité technique et neutre
et qu’elle soit ainsi perçue par les citoyens. Non sans oublier de prévoir des dispositions
pour assurer le recrutement de personnel compétent, méritant et intègre. « Cela implique que les critères de recrutement et de déroulement de la
carrière intègrent la compétitivité et la probité. Il est impérieux de se doter
d’une corporation de juges de comptes avec un statut propre », précise-t-il
encore. En définitive tel que stipule
l’extrait de la directive n°02/2000/Uemoa du 29 juin 2000 portant
adoption du code de transparence dans la gestion des finances publiques : « Il n’y a pas de bonne gestion
des finances publiques sans un contrôle a posteriori efficace dévolu à une
juridiction financière indépendante et dotée de pouvoirs et de capacités
d’investigation étendues. Les Etats membres devront créer des Cours des Comptes
Autonomes au plus tard le 31 décembre 2002 ».
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